Rôle du psychologue en soin palliatif

Le psychologue accueille le patient et saura apporter les mots appropriés pour amener le malade en fin de vie à confier ses angoisses, ses appréhensions, ses peurs mais aussi ses souvenirs heureux ou malheureux, ses joies et ses peines. Ces derniers moments de vie constituent en effet de bonnes occasions pour le patient de repasser des tranches de sa vie, de se remémorer des moments forts et parfois de se repentir. S’il est souvent difficile pour les proches de le persuader de se confier, le psychologue pour sa part aura moins de difficultés à amener le patient à ces moments de confidences.

Effets de l’anticipation de la mort sur différents processus de séparation avec les objets d’attachement. Elisabeth Kubler Ross, a défini 5 étapes d’un travail de deuil pour traverser ce dernier moment de séparation avec les autres et avec le patient lui-même (apprendre à affronter sa propre mort) :

  •     Le déni
  •      La colère
  •     Le marchandage
  •      La dépression
  •      L’acceptation
     

L’entretien psychologique

Permettre l’émergence d’un lien psychique qui autorise une relation à l’autre en dehors de tout objectif. Nous n’amenons pas l’autre vers un but que nous pensons être le mieux pour lui. Dans ce cas, à la différence des entretiens en cabinet, il nous faut « bricoler » un espace et un temps où la parole peut quitter le champ social et familier pour permettre au patient une élaboration psychique, c’est à  dire tenter de donner du  sens à  ce  qui lui arrive.

Nous accueillons un discours changeant, qui témoigne des fluctuations psychiques liées  à  l’effraction que représente la maladie grave chez le sujet. Cela  est d’autant plus  prégnant quand l’échappée thérapeutique se profile. L’ambivalence, l’incohérence, les questions contradictoires,  voire insensées peuvent s’exposer dans cet espace particulier. Il n’est pas question pour l’autre de tout dire ou de parler de la mort. La suite des rencontres au domicile est décidée en fonction de divers paramètres : les consultations hospitalières, les séances de chimiothérapie, les passages des intervenants du domicile et surtout par l’état du patient, de sa fatigue et de sa capacité à entrer en relation. C’est en discutant avec le patient et son entourage que nous essayons de trouver le moment le plus propice à nos rencontres. Certains nous demandent de venir après leur toilette quand ils sont habillés dans un désir de maintenir un lien social, ou après le kinésithérapeute car ils se trouvent plus réveillés et sont installés confortablement dans leur fauteuil.

Notre exercice doit être plastique. Le patient est le guide des formes que peuvent prendre ces entretiens. Il s’instaure pour beaucoup d’entre eux une ritualisation de nos visites aussi bien dans les temps de nos rencontres, que dans l’aménagement de l’espace…

Au cabinet, c’est le psychologue clinicien qui assigne sa place à celui qui vient consulter. Ici, les rôles sont inversés : nous sommes « invités » à nous installer à tel endroit, parfois peu confortable. Aussi au domicile du patient, les interférences sont fréquentes et parfois nombreuses, sans que l’on puisse toujours bien les limiter.

Au-delà du risque létal qu’impose les bouleversements psychiques pour le patient et son entourage, nous apprenons en travaillant au domicile qu’il est de même de l’espace privé et de son aménagement : le salon, lieu collectif se transforme progressivement en chambre d’hôpital, les odeurs de la maison peuvent changer, le lit médical peut faire son apparition. Il s’opère aussi un réaménagement de l’espace privé.

En cabinet, le psychologue ne sait du patient que ce qu’il veut bien en dire. Au domicile, des informations sur lui sont livrées sans qu’elles soient portées par le langage : le décor, les objets, les meubles, les photos, etc…Ce fait ne doit pas être ignoré par le psychologue mais analysé. Est-ce une aide ou une gêne pour nous ? Quelle(s) conséquence(s) sur notre qualité d’écoute et notre soutien à l’autre ?

Que faire de ces informations qui peuvent induire chez le psychologue des questions sur l’organisation et l’histoire familiale ? Les verbaliser auprès du patient ou attendre qu’elles surgissent au cours de l’entretien ? Une seule et unique réponse à cette spécificité du domicile n’existe pas. Chaque psychologue devra dans cette rencontre toujours particulière à l’autre y trouver une réponse.

Autre particularité du travail à domicile : la confidentialité du psychologique (et non le contenu des entretiens) ne peut exister. Dans le cadre du domicile nous sommes souvent amenés à écouter les proches, à débuter un entretien à deux et le terminer à plusieurs parce que le conjoint est rentré du travail ou les enfants reviennent de l’école.

De plus, nous devons partager des informations avec les autres intervenants du domicile et avec l’équipe de coordination du réseau (notion de secret partagé). Partager l’information utile afin d’améliorer la prise en charge et pour répondre aux sollicitations régulières des autres professionnels pour les éclairer à la fois sur ce qu’ils ne comprennent pas ou sur les décisions qu’ils doivent prendre…Alors le partage et l’échange doivent avoir cours. Pour autant la place du psy reste particulière. En effet, tous les autres acteurs du soin sont formés à des pratiques techniques. En cela, les psys sont différents puisque leur seul outil pour aller à la rencontre de l’autre est l’échange langagier.

Prévention et anticipation

Evaluer la faisabilité du maintien à domicile du patient pour répondre à la prévention des conséquences psychopathologiques de l’entourage. Cette évaluation reste difficile car labile dans le temps. Evaluer autant que nécessaire et appréhender les ressources psychiques des proches restent choses complexes. Evaluer les ressources et les possibilités psychiques d’une famille, prévenir certains incidents psychiques, éviter une surcharge de souffrance, anticiper les ruptures et les hospitalisations dans l’urgence. Voila ce qui nous est parfois demandé. L’expérience du terrain montre que la souffrance psychique des familles se traduit par des troubles du sommeil, une asthénie et des troubles anxiodépressifs. Il semblerait que les états dépressifs des proches soient divisés par deux lorsqu’ils bénéficient d’un accompagnement psychologique. En effet, l’épuisement physique et psychique des familles est l’une des premières causes de réhospitalisation en urgence des patients. Ces réhospitatalisations sont source d’inconfort et de traumatisme pour tous.

Soulignons aussi qu’après le décès du patient, ses proches sont exposés à un risque de dépression.

Pour ce faire, le temps de présence du psychologue au domicile est parfois un temps de remise en circulation d’une parole dans la famille, une parole, parfois entravée par la maladie et le pronostic. Il réinitie une certaine mobilité psychique des échanges familiaux.

La communication devient généralement plus difficile quand l’état de santé du patient se dégrade et que le pronostic vital est engagé. Il est nécessaire de ne pas écarter les proches d’une réalité douloureuse, de les autoriser à ressentir du chagrin, de la détresse et de l’injustice.